Page:Laplace - Œuvres complètes, Gauthier-Villars, 1878, tome 6.djvu/205

Cette page a été validée par deux contributeurs.

la quantité de mouvement devait se conserver toujours la même dans l’univers, sans égard à sa direction, a déduit de cette fausse hypothèse de fausses lois de la communication du mouvement, qui sont un exemple remarquable des erreurs auxquelles on s’expose en cherchant à deviner les lois de la nature par les vues qu’on lui suppose.

Lorsqu’un corps reçoit une impulsion suivant une direction qui passe par son centre de gravité, toutes ses parties se meuvent avec une égale vitesse. Si cette direction passe à côté de ce point, les diverses parties du corps ont des vitesses inégales, et de cette inégalité résulte un mouvement de rotation du corps autour de son centre de gravité, en même temps que ce centre est transporté avec la vitesse qu’il aurait prise si la direction de l’impulsion eût passé par ce point. Ce cas est celui de la Terre et des planètes. Ainsi, pour expliquer le double mouvement de rotation et de translation de la Terre, il suffit de supposer qu’elle a reçu primitivement une impulsion dont la direction a passé à une petite distance de son centre de gravité, distance qui, dans l’hypothèse de l’homogénéité de cette planète, est à peu près la cent soixantième partie de son rayon. Il est infiniment peu probable que la projection primitive des planètes, des satellites et des comètes ait passé exactement par leurs centres de gravité : tous ces corps doivent donc tourner sur eux-mêmes. Par une raison semblable, le Soleil, qui tourne sur lui-même, doit avoir reçu une impulsion, qui, n’ayant point passé par son centre de gravité, le transporte dans l’espace, avec le système planétaire, à moins qu’une impulsion dans un sens contraire n’ait anéanti ce mouvement, ce qui n’est pas vraisemblable.

L’impulsion donnée à une sphère homogène, suivant une direction qui ne passe point par son centre, la fait tourner constamment autour du diamètre perpendiculaire au plan mené par son centre et par la direction de la force imprimée. De nouvelles forces qui sollicitent tous ses points et dont la résultante passe par son centre n’altèrent point le parallélisme de son axe de rotation. C’est ainsi que l’axe de la Terre reste toujours à très peu près parallèle à lui-même dans sa révolution autour du Soleil, sans qu’il soit nécessaire de supposer avec Copernic