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vements observée de la Terre, forme le mouvement apparent, que l’on nomme mouvement géocentrique. On aura donc la véritable position de l’astre, en ajoutant à sa longitude et à sa latitude géocentriques observées, son mouvement géocentrique en longitude et en latitude, dans l’intervalle de temps que la lumière emploie à parvenir de l’astre à la Terre. Ainsi, le centre du Soleil nous paraît constamment moins avancé de 62″,5 dans son orbe que si la lumière nous parvenait dans un instant.

L’aberration change les rapports apparents des phénomènes célestes soit avec l’espace, soit avec la durée. Au moment où nous les voyons encore, ils ne sont déjà plus ; il y a vingt-cinq ou trente minutes que les satellites de Jupiter ont cessé d’être éclipsés, quand nous apercevons la fin de leurs éclipses, et les variations des étoiles changeantes précèdent de plusieurs années les instants de leurs observations. Mais toutes ces causes d’illusion étant bien connues, nous pouvons toujours rapporter les phénomènes du système solaire, à leur vrai lieu et à leur véritable époque.

La considération des mouvements célestes nous conduit donc à déplacer la Terre, du centre du monde où nous la supposions, trompés par les apparences et par le penchant qui porte l’homme à se regarder comme le principal objet de la nature. Le globe qu’il habite est une planète en mouvement sur elle-même et autour du Soleil. En l’envisageant sous cet aspect, tous les phénomènes s’expliquent de la manière la plus simple ; les lois des mouvements célestes sont uniformes ; toutes les analogies sont observées. Ainsi que Jupiter, Saturne et Uranus, la Terre est accompagnée d’un satellite ; elle tourne sur elle-même, comme Vénus, Mars, Jupiter, Saturne et probablement toutes les autres planètes ; elle emprunte comme elles sa lumière du Soleil, et se meut autour de lui dans le même sens et suivant les mêmes lois. Enfin la pensée du mouvement de la Terre réunit en sa faveur la simplicité, l’analogie et généralement tout ce qui caractérise le vrai système de la nature. Nous verrons, en la suivant dans ses conséquences, les phénomènes