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avoir sur les phénomènes capillaires une influence très-sensible, que semblent indiquer plusieurs expériences de M. Gay-Lussac sur l’élévation de divers mélanges d’alcool et d’eau dans les tubes capillaires.

Une lame d’eau isolée et d’une épaisseur plus petite que le rayon de la sphère d’activité sensible de ses molécules éprouvant donc une compression beaucoup moindre qu’une pareille lame située au milieu d’une masse considérable de ce liquide, il est naturel d’en conclure que sa densité est très-inférieure à la densité de cette masse. Est-il invraisemblable de supposer que c’est le cas de l’enveloppe aqueuse des vapeurs vésiculaires, qui par là seraient plus légères et dans un état moyen entre l’état liquide et celui de vapeurs ?

Je n’ai eu égard, dans ma Théorie, ni à la pression de l’atmosphère, ni à la force révulsive de la chaleur. La considération de ces forces est inutile, parce que, étant les mêmes sur toute la surface du liquide, elles sont indépendantes de sa courbure. La chaleur n’influe donc sur les phénomènes capillaires qu’en diminuant la densité des liquides, et l’expérience a fait voir que, dans les liquides parfaitement fluides, les variations de ces phénomènes, produites par l’accroissement de la température, sont exactement celles que donne la théorie.

Les effets de l’action capillaire étant ramenés à une théorie mathématique, il ne manquait plus à cette branche intéressante de la Physique qu’une suite d’expériences très-exactes au moyen desquelles on pût comparer les résultats de cette théorie avec la nature. Le besoin de semblables expériences se fait sentir à mesure que la Physique, en se perfectionnant, rentre dans le domaine de l’Analyse. On peut alors obtenir avec une grande précision les résultats des théories, et, en les comparant à des expériences très-précises, on élève ces théories au plus haut degré de certitude dont les sciences naturelles soient susceptibles. Heureusement, les expériences que MM. Rumford et Gay-Lussac viennent de faire sur les phénomènes de la capillarité laissent peu de choses à désirer sur cet objet, et l’on a vu l’accord de ma théorie avec les résultats de M. Gay-Lussac, qui a introduit dans ce genre d’expériences l’exactitude des observations astronomiques.