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sensibles dans leur écoulement par des canaux étroits ; ce phénomène composé ne peut donc pas nous conduire aux lois de l’attraction moléculaire. Quand on veut remonter à un principe général, la méthode philosophique prescrit d’en considérer les effets les plus simples. Ce fut par les lois simples du mouvement elliptique que Newton découvrit le principe de la pesanteur universelle, qu’il eût difficilement reconnu dans les inégalités nombreuses et compliquées du mouvement lunaire. On doit pareillement rechercher les lois des attractions moléculaires, en considérant leurs effets dans les phénomènes de la statique chimique et dans ceux que présente l’équilibre des liquides contenus dans les espaces capillaires. Ces phénomènes ne laissent aucun lieu de douter que ces attractions soient insensibles à des distances sensibles ; ils prouvent encore qu’elles s’étendent au delà du contact ; autrement l’expression intégrale des effets capillaires serait nulle, ainsi que l’influence de la masse dans les affinités chimiques, influence dont M. Berthollet a si bien développé les effets et à laquelle la théorie capillaire prête l’appui du calcul. Mais s’il est indispensable d’admettre, entre les molécules des substances pondérables, des forces qui s’étendent à une petite distance des surfaces, il serait contraire à tous les phénomènes de supposer cette distance appréciable. De pareilles forces seraient sensibles dans les observations astronomiques et dans les expériences du pendule ; surtout elles se seraient manifestées dans la belle expérience de Cavendish, pour déterminer la densité de la Terre. Dans toutes ces observations très précises, on n’a reconnu que les effets de la pesanteur universelle. Quelques physiciens, pour expliquer les phénomènes du magnétisme, avaient introduit des forces attractives et révulsives, décroissantes comme le cube de la distance ; mais Coulomb, qui joignait, à l’art de faire avec précision les expériences, l’esprit d’investigation qui sait les diriger vers un but intéressant, reconnut que les forces de l’électricité et du magnétisme suivent la même loi que l’attraction universelle. Ces forces présentent quelquefois, par leur décomposition, des résultantes qui décroissent eu raison du cube de la distance, comme il arrive aux attractions du