Page:Laplace - Œuvres complètes, Gauthier-Villars, 1878, tome 14.djvu/184

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

rences très sensibles, relatives aux fatigues et aux dangers inséparables de chaque état, et dont il est indispensable de tenir compte dans les calculs fondés sur la durée de la vie. Mais ces différences n’ont pas encore été suffisamment déterminées. Elles le seront un jour : alors on saura quel sacrifice de la vie chaque profession exige, et l’on profitera de ces connaissances pour en diminuer les dangers.

Si l’on divise la somme des années de la vie de tous les individus considérés dans une Table de mortalité par le nombre de ces individus, on a la durée moyenne de la vie, que l’on trouve ainsi de vingt+huit ans et demi. La durée moyenne de ce qui reste encore à vivre, lorsqu’on est parvenu à un âge quelconque, se détermine en faisant une somme des années qu’ont vécu au delà de cet âge tous les individus qui l’ont atteint, et en la divisant par le nombre de ces individus. Ce n’est point au moment de la naissance que cette durée est la plus grande ; c’est lorsqu’on a échappé aux dangers de la première enfance, et alors elle est d’environ quarante-trois ans. La probabilité d’arriver à un âge quelconque, en partant d’un âge donné, est égale au rapport des deux nombres d’individus indiqués dans la Table à ces deux âges.

On conçoit que la précision de ces résultats exige que l’on considère un très grand nombre de naissances ; mais l’analyse des probabilités nous montre qu’ils approchent sans cesse de la vérité, avec laquelle ils finissent par coïncider, lorsque le nombre des naissances considérées devient infini.

On a observé qu’il existe plus de femmes que d’hommes, quoiqu’il naisse plus de garçons que de filles. Or, dans les contrées où la population est constante, le rapport de la population aux naissances annuelles est égal au nombre des années de la durée moyenne de la vie ; cette durée est donc plus grande pour les femmes que pour les hommes, soit en vertu de leur constitution, soit parce qu’elles sont exposées à moins de dangers.

Il est visible que la durée moyenne de la vie serait augmentée si les guerres devenaient plus rares, si l’aisance était plus grande et plus générale et si, par des moyens quelconques, l’homme parvenait à