Page:Laplace - Œuvres complètes, Gauthier-Villars, 1878, tome 14.djvu/178

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

d’années, a peu différé de dix-neuf mille ; et j’ai oui dire qu’à la poste, le nombre des lettres mises au rebut, par les défauts des adresses, était à peu près le même chaque année.

Au milieu de l’inconstance des phénomènes qui semblent le plus dépendre du hasard, il existe donc des rapports fixes vers lesquels ils tendent sans cesse, mais qu’ils ne peuvent atteindre que dans l’infini. La recherche de ces rapports et des lois suivant lesquelles les résultats des phénomènes s’en approchent est un des points les plus intéressants de la théorie des probabilités.

Chacune des causes auxquelles un événement observé peut être attribué est indiquée avec d’autant plus de vraisemblance qu’il est plus probable que, cette cause étant supposée exister, l’événement aura lieu ; la probabilité de l’existence d’une quelconque de ces causes est donc une fraction dont le numérateur est la probabilité de l’événement résultant de cette cause, et dont le dénominateur est la somme des probabilités semblables relatives à toutes les causes.

C’est le principe fondamental de cette branche de l’Analyse des hasards, qui consiste à remonter des événements aux causes.

Ce principe donne la raison pour laquelle on attribue les événements réguliers à une cause particulière. Quelques philosophes ont cru que ces événements sont moins possibles que les autres et qu’au jeu de croix et pile, par exemple, la combinaison dans laquelle croix arrive vingt fois de suite est moins facile à la nature que celle où croix et pile sont entremêlées d’une façon irrégulière. Mais cette opinion suppose que les événements passés influent sur la possibilité des événements futurs, ce qui n’est point admissible. Les combinaisons régulières n’arrivent plus rarement que parce qu’elles sont moins nombreuses. Si nous recherchons une cause là où nous apercevons de la symétrie, ce n’est pas que nous regardions un événement symétrique comme étant moins possible que les autres ; mais, cet événement devant être l’effet d’une cause régulière ou celui du hasard, la première de ces suppositions est plus probable que la seconde. Nous