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Après cette courte digression que je me suis permise pour suppléer, à quelques égards, les leçons que je devais vous faire sur l’Analyse infinitésimale, je reviens aux probabilités : lorsque les événements que l’on considère sont en très grand nombre, les formules auxquelles on est conduit se composent d’une si grande multitude de termes et de facteurs que leur calcul numérique devient impraticable. Il est alors indispensable d’avoir une méthode qui transforme ces formules en séries convergentes. J’ai donné pour cet objet, dans les Mémoires de l’Académie des Sciences[1], une méthode fondée sur la transformation des formules fonctions de très grands nombres, en intégrales définies que l’on intègre par des séries très convergentes ; et il y a cela de remarquable, savoir, que la quantité sous le signe intégral est la fonction génératrice de la fonction exprimée par l’intégrale définie ; en sorte que les théories des fonctions génératrices et des approximations lies formules fonctions de très grands nombres peuvent être considérées comme les deux branches d’un même calcul que je désigne sous le nom de Calcul des fonctions génératrices.

Par son moyen on peut déterminer avec facilité les limites de la probabilité des résultats et des causes indiqués par les événements considérés en grand nombre, et les lois suivant lesquelles cette probabilité approche de ses limites à mesure que les événements se multiplient. Cette recherche, la plus délicate de la théorie des hasards, mérite l’attention des géomètres par l’analyse qu’elle exige, et celle des philosophes, eu faisant voir comment la régularité finit par s’établir dans les choses mêmes qui nous paraissent entièrement livrées au hasard, et en nous dévoilant les causes cachées, mais constantes, dont cette régularité dépend. Mais je dois ici me borner à vous présenter les principes et les résultats généraux de la théorie des probabilités.

Quand deux événements dépendent l’un de l’autre, la probabilité de l’événement composé est le produit de la probabilité du premier de ces événements par la probabilité que, cet événement étant arrivé, l’autre aura lieu.

  1. Œuvres de Laplace, t. IX, X et XII.