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montre dans le mouvement des comètes a lieu, sans aucun doute, dans tous les phénomènes ; la courbe décrite par le plus léger atome est réglée d’une manière aussi certaine que les orbites planétaires ; il n’y a de différence entre elles que celle qu’y met notre ignorance.

La probabilité est relative en partie à cette ignorance, et en partie à nos connaissances. Nous savons que sur trois ou un plus grand nombre d’événements un seul doit exister ; mais rien ne porte à croire que l’un d’eux arrivera plutôt que les autres ; dans cet état d’indécision il nous est impossible de prononcer avec certitude sur leur existence. Il est cependant probable qu’un de ces événements, pris à volonté, n’existera pas, parce que nous voyons plusieurs cas également possibles qui excluent son existence, tandis qu’un seul la favorise.

La théorie des hasards consiste à réduire tous les événements du même genre à un certain nombre de cas également possibles, c’est-à-dire tels que nous soyons également indécis sur leur existence ; et à déterminer le nombre des cas favorables à l’événement dont on cherche la probabilité. Le rapport de ce nombre à celui de tous les cas possibles est la mesure de cette probabilité, qui n’est ainsi qu’une fraction dont le numérateur est le nombre des cas favorables, et dont le dénominateur est le nombre de tous les cas possibles.

La notion précédente de la probabilité suppose qu’en faisant croître dans le même rapport le nombre des cas favorables et celui des cas possibles, la probabilité reste la même. Pour s’en convaincre, que l’on considère deux urnes et dont la première contienne quatre boules blanches et deux noires, et dont la seconde ne renferme que deux boules blanches et une noire. On peut imaginer les deux boules noires de la première urne attachées par un fil qui se rompt au moment où l’on saisit l’une d’elles, et les quatre boules blanches formant deux systèmes semblables. Toutes les chances qui feront saisir l’une des boules du système noir amèneront une boule noire. Si l’on conçoit maintenant que les fils qui unissent les boules ne puissent se rompre, il est clair que le nombre des chances possibles ne changera pas, non plus que celui des chances favorables à l’extraction des boules noires,