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DES PLANÈTES ET DES SATELLITES.

Lune. L’action mutuelle des trois premiers satellites les maintiendrait sans cesse, en sorte que le système de ces corps, en descendant insensiblement vers Jupiter, en vertu de ces accélérations, conserverait toujours les rapports nécessaires à l’existence des conditions précédentes. Ainsi l’action de la Terre sur la Lune maintient l’égalité rigoureuse des deux mouvements de rotation et de révolution de ce satellite, malgré l’accélération continuelle du second de ces deux mouvements, parce que le premier devient en même raison plus rapide. De là résulte cette conséquence, savoir que, si, pour mieux représenter les observations, on admet une équation séculaire dans le moyen mouvement de l’un des trois premiers satellites de Jupiter, ainsi que M. Bailly l’a fait dans ses Tables du premier satellite, il faut en supposer de semblables dans les moyens mouvements des deux autres, et les ordonner de manière que l’équation du premier, plus deux fois celle du troisième, soit égale à trois fois l’équation du second satellite.

On voit, par ce que nous venons de dire, que l’action mutuelle des satellites de Jupiter ne produit dans leurs mouvements que des inégalités périodiques ; et nous pouvons généralement en conclure que, si l’on n’a égard qu’aux lois de la gravitation universelle, les moyennes distances des corps célestes aux foyers de leurs forces principales sont immuables. Il n’en est pas ainsi des autres éléments de leurs orbites : on sait que leurs excentricités, leurs inclinaisons, les positions de leurs nœuds et de leurs aphélies varient sans cesse ; et il existe des méthodes fort simples pour déterminer ces variations, en supposant les orbites peu excentriques et peu inclinées les unes aux autres. Mais les excentricités et les inclinaisons sont-elles renfermées constamment dans d’étroites limites ? C’est un point important du système du monde qui reste encore à éclaircir, et dont la discussion est la seule chose que laisse maintenant à désirer la théorie des inégalités séculaires. J’ai prouvé, dans la seconde Partie de nos Mémoires pour l’année 1772[1], que, si l’on ne considère que l’action de deux planètes, les excentricités et les inclinaisons de leurs orbites sont toujours très

  1. Œuvres de Laplace, T. XIII, p. 419 et suiv.