Page:Laplace - Œuvres complètes, Gauthier-Villars, 1878, tome 11.djvu/64

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
50
MÉMOIRE SUR LES INÉGALITÉS SÉCULAIRES

Parmi ces inégalités, la plus intéressante est celle qui peut altérer les moyens mouvements des planètes. La plupart des astronomes ont admis une équation séculaire proportionnelle aux carrés dès temps dans les moyens mouvements de Jupiter et de Saturne. Les géomètres qui se sont occupés avec le plus de succès de la théorie de ces planètes, MM. Euler et de la Grange, avaient cru en trouver la cause dans l’action mutuelle de ces deux corps ; mais leurs résultats différaient tellement entre eux, qu’il y avait lieu d’y soupçonner quelque erreur ; c’est ce qui me détermina à reprendre cette matière et à la traiter avec tout le soin que mérite son importance. En portant la précision jusqu’aux troisièmes puissances inclusivement des excentricités et des inclinaisons des orbites, je trouvai que la théorie ne donne aucune inégalité séculaire dans les moyens mouvements et dans les moyennes distances des planètes au Soleil ; d’où je conclus que ces inégalités sont nulles ou du moins insensibles depuis l’époque des observations les plus anciennes jusqu’à nos jours.

Ce résultat suffit aux besoins de l’Astronomie, dont les plus anciennes observations qui nous soient parvenues avec quelque vraisemblance ne remontent pas au delà de cinq mille ans. M. de la Grange l’a étendu depuis à un temps illimité, en faisant voir par une analyse ingénieuse et simple que les moyennes distances des planètes au Soleil sont immuables et leurs moyens mouvements uniformes, ce qui est également vrai pour les satellites, puisqu’ils forment autour de leurs planètes principales des systèmes semblables à celui des planètes autour du Soleil. Ainsi les planètes et les satellites conservent toujours les mêmes distances moyennes aux foyers des forces principales qui les animent, du moins lorsque l’on n’a égard qu’à leur action mutuelle et lorsque l’on suppose leurs moyens mouvements incommensurables entre eux, comme cela existe pour les planètes de notre système.

Il est cependant impossible de ne pas reconnaître des variations très sensibles dans les révolutions de Jupiter et de Saturne. Si l’on compare entre elles les observations de ces deux planètes, faites depuis