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ET LES MORTS, ETC.

de leurs habitants, à une époque donnée, et, par le relevé des naissances durant les dix années qui précèdent cette époque, on déterminera le nombre correspondant des naissances annuelles. En divisant par ce nombre celui des habitants, on aura le rapport de la population aux naissances, d’une manière d’autant plus précise que le dénombrement sera plus considérable. Comme le nombre des naissances annuelles en France excède celui des morts, il est nécessaire, pour établir une exacte parité entre la population entière de la France et celle de ces paroisses, de les choisir de manière que le nombre total des morts soit à celui des naissances dans le rapport qu’ont entre eux ces deux nombres, relativement à tout le royaume. Si l’on a soin de distinguer les sexes, on aura séparément la population des hommes, celle des femmes et la durée de la vie moyenne de chacun des deux sexes, ce qui est intéressant à connaître. Un dénombrement semblable, fait avec soin dans les divers pays, et renouvelé dans différents siècles, donnerait les différences que le climat, le temps et les gouvernements peuvent produire dans la durée moyenne de la vie des hommes.

Le rapport de la population aux naissances, déterminé par la méthode précédente, ne peut jamais être rigoureusement exact ; en lui supposant même une précision rigoureuse, il resterait encore sur la population de la France l’incertitude qui naît de l’action des causes variables. La population de la France, tirée des naissances annuelles, n’est donc qu’un résultat probable, et par conséquent susceptible d’erreurs. C’est à l’analyse des hasards à déterminer la probabilité de ces erreurs et jusqu’à quel point on doit porter le dénombrement pour qu’il soit très probable qu’elles seront renfermées dans d’étroites limites. Ces recherches dépendent d’une théorie nouvelle et encore peu connue, celle de la probabilité des événements futurs prise des événements observés ; elles conduisent à des formules dont le calcul numérique est impraticable, à cause des grands nombres que l’on y considère ; mais, ayant donné dans ce Volume et dans le précédent [1] les principes nécessaires pour résoudre ce genre de questions, et une

  1. Œuvres de Laplace, T. X.