Page:Langlois - Rig Véda.djvu/31

Cette page a été validée par deux contributeurs.
23
INDE. — INTRODUCTION.

commentaires pratiques, les Brahmanas ; des recensions sacerdotales, les Samhitas ; des résumés liturgiques, les Soutras ; des leçons religieuses, les Oupanichads ; une encyclopédie officielle, les Sastras, et enfin une réforme radicale, d’abord victorieuse et ensuite vaincue, le bouddhisme : inextricable confusion de vérités et d’erreurs, d’utopies et de systèmes, de réalités et de rêves, sans date, sans chronologie, sans fil conducteur.

Ce n’est que plus tard, et au fur et à mesure du classement des formes différentes sous lesquelles la pensée humaine s’est manifestée, que nous pourrons passer en revue tous les produits de l’inspiration indienne. Aujourd’hui nous n’avons à nous occuper d’une manière spéciale que des Védas, dont le nom signifie : science suprême.

Les Védas sont au nombre de quatre, le Rig, le Sâma, le Yadjour, et l’Atharva-Véda. Le Rig, le Sâma, et l’Atharva ne renferment que des vers ; le Yadjour-Véda contient des vers et de la prose et se partage en Yadjour blanc et Yadjour noir. Ces quatre livres constatent, selon nous, dans la série lyrique, les deux premières périodes de la civilisation indienne. Le Rig, le plus ancien et le plus vénéré de tous, auquel on a souvent donné le nom unique de Véda, nous a conservé les traditions du culte de la famille, et contient les seuls documents historiques et littéraires qui nous restent de l’Inde dans la période primitive. Le Yadjour et le Sama-Véda sorte de rituels des cérémonies du culte sacerdotal, nous semblent affirmer l’avénement de la période d’organisation dont le Code de Manou est la plus haute expression. Par contre l’Atharva-Veda, par ses objurgations, ses superstitions, ses colères et ses haines, par son manque presque absolu de valeur philosophique et littéraire, indique que ce qu’il y avait de beau et de bon dans les idées cosmologiques du Rig-Véda, ce qu’il pouvait y avoir d’utile dans la forte et intelligente constitution du brahmanisme s’était entièrement dégradé et que la période d’organisation touchait à sa fin. Le terrain est donc préparé : Kapila et Çakya-Mouni n’ont plus qu’à venir, l’un pour opposer sa philosophie rationnelle à l’absorbante orthodoxie brahmanique, l’autre pour combattre les castes au nom de l’égalité de la douleur et de la misère humaine.

Il suffit de lire les hymnes du Rig pour reconnaître qu’ils ont été chantés dans le Saptasindhou, le pays des sept rivières de la vallée de l’Indus. La division en castes n’existait pas à cette époque. La constitution du pouvoir politique et du pouvoir religieux s’organisait peu à peu, comme ailleurs. Mais ici c’est le pouvoir politique qui a été vaincu dans la personne de Viçwamitra, forcé de se faire brahmane, pour rester puissant ; et, dès lors, les deux pouvoirs, n’en ont plus formé qu’un seul, quoique divisés en apparence. Le Yadjour et le Sâma-Véda, représentant la constitution brahmanique définitive, nous conduisent peut-être au temps où les Aryas s’étaient avancés de l’ouest au sud-est des monts Hymalaya, sur les bords de la Saraswati et du Gange où fut composé plus tard l’Atharva-Véda. Quoi qu’il en soit, ce que nous savons d’une manière certaine, c’est que chaque Véda a emprunté ses vers au Rig, en