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d’aller à la messe de minuit. « Ce sera, sans doute, la dernière fois de ma vie, se disait-elle. Je vieillis ; me voilà vieille, bien vieille. Mais j’ai de bonnes jambes encore. Et je connais bien le chemin. Après tout, il n’y a qu’un petit bout de bois à traverser ; le reste est du chemin battu… Et le temps s’annonce très doux… Ah ! revoir encore une fois cette crèche toute ruisselante de feux, et l’Enfant-Jésus couché sur la paille fraîche, et la Sainte-Vierge en robe bleue, et Saint-Joseph avec son rabot, tout en rouge, et puis les Rois Mages avec leurs couronnes magnifiques, et puis les Bergers et les moutons !… S’agenouiller encore une fois auprès de ce petit Enfant blond, maître du monde, qui sourit, qui attire, qui pardonne et qui bénit ! Pleurer auprès de lui comme autrefois, lui demander ses bénédictions pour sa vache et pour elle ! » Tel était le rêve qui mettait l’extase au fond de ses yeux.

À mesure que les jours avançaient, de plus en plus son rêve se précisait. Elle irait à la messe de minuit. Elle partirait quelques heures d’avance — puisqu’elle ne marche pas vite — et elle emmènerait sa vache au bout d’une corde. Pas un ins-