Page:Lambert - Rencontres et entretiens, 1918.djvu/37

Cette page a été validée par deux contributeurs.
35
LES « CHÊNEURS »

Je m’étais marié quelques années auparavant j’étais père de deux enfants, un garçon et une fille. Trois ans avant la mort de ma mère, j’avais eu la douleur de perdre ma femme. Je décidai de quitter cet endroit qui ne pouvait me rappeler que de tristes souvenirs. C’est depuis ce temps que je suis venu demeurer à M…

Quand le vieillard eut fini de parler, je restai encore quelque temps avec lui cherchant à chasser de son esprit les noirs pressentiments qui l’obsédaient. Ce soir-là, quand je le quittai, j’étais triste et ne savais que penser. Le lendemain en revenant de mon travail, comme je passais devant la porte, je fus saisi d’une pénible émotion. Le vieillard n’était pas assis à sa place habituelle, mais à la porte pendait un crêpe. J’entrai dans la maison pour m’enquérir de ce qui pouvait être arrivé à la famille. Voici ce qu’on m’apprit : Quelques instants après que j’eus quitté le vieillard, dans la rue en face une rencontre avait eu lieu entre un groupe de Canadiens-français et d’Irlandais. Des mots on en était venu aux coups. Dans la mêlée, au plus fort de la bataille, une pierre écartée, lancée avec force par un des combattants, était venue frapper le vieillard à la tête. On l’avait rentré privé