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MICOL, à David.

Non : nous mourrons ensemble, ou je suivrai tes pas
Mais parle ! qu’as-tu fait ? dans quel climat sauvage
As-tu caché tes jours, pendant ce long veuvage ?
Quel Dieu te protégea ? quel Dieu t’a ramené ?


DAVID.

Hélas ! traînant partout mon sort infortuné,
Quels bords n’ont pas été témoins de ma misère ?
J’ai porté ma fortune aux deux bouts de la terre ;
D’abord, loin des humains, seul avec ma douleur,
J’ai cherché les déserts et j’aimais leur horreur ;
Des profondes forêts j’aimais les vastes ombres ;
Les monts et les rochers et leurs cavernes sombres
M’ont vu pendant deux ans troubler leur triste paix,
Disputer un asile aux monstres des forêts,
Arracher aux lions leur dépouille sanglante,
Et me nourrir comme eux d’une chair palpitante.
Du moins lorsque la nuit enveloppait les cieux.
Je gravissais les monts qui dominaient ces lieux,
Et, parcourant de loin cette immense étendue,
Je revoyais la terre à mes yeux si connue ;
La lune, me prêtant ses paisibles clartés,
Me montrait ces vallons par mon peuple habités,
La plaine où tant de gloire illustra mon jeune âge,
Et du fleuve sacré le paisible rivage ;
Sur son cours fortuné j’attachais mes regards,
Et mes yeux de Sion distinguaient les remparts !
« Voilà Sion ! disais-je. Et voilà la