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ensée !


JONATHAS.

Rappelez, ô mon roi ! votre vertu passée !
Soyez toujours Saül ! qu’Israël aujourd’hui
Retrouve en vous son roi, son vengeur, son appui.
Ramenez la fortune au bruit de votre gloire.


SAÜL.

Malheureux ! Est-ce à moi de parler de victoire ?
Va ! loin des cheveux blancs la victoire s’enfuit !
Des bonheurs d’ici-bas la vieillesse est la nuit !
Ce bras est impuissant à sauver ma couronne ;
Dieu la mit sur mon front, mais ce Dieu m’abandonne ;
Et partout un abîme est ouvert sous mes pas.


JONATHAS.

Nous fléchirons le ciel !


SAUL.

                                     On ne le fléchit pas.
Inexorable, au gré de son ordre suprême
Il conduit les mortels, les peuples, les rois même :
Aveugles instruments de ses secrets desseins.
Tout tremble devant nous ; nous tremblons dans ses mains.
Sous les doigts du potier l’argile est moins soumise,
Et Dieu, quand il lui plaît, nous rejette et nous brise ;
Il m’a brisé, mon fils ! j’ai régné, j’ai vécu !
Bientôt ma race et moi nous aurons disparu !


JONATHAS.

D’où vous vient, ô mon roi ! cet effrayant augure ?