Page:Lamartine - Œuvres complètes de Lamartine, tome 6.djvu/455

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

au champ, et fut bien surpris de voir que les deux tas étaient toujours pareils : ni l’un ni l’autre ne pouvait intérieurement se rendre compte de ce prodige ; ils firent de même pendant plusieurs nuits de suite ; mais comme chacun d’eux portait au tas de son frère le même nombre de gerbes, les tas demeuraient toujours égaux, jusqu’à ce qu’une nuit, tous deux s’étant mis en sentinelle pour approfondir la cause de ce miracle, ils se rencontrèrent portant chacun les gerbes qu’ils se destinaient mutuellement.

» Or, le lieu où une si bonne pensée était venue à la fois et si persévéramment à deux hommes devait être une place agréable à Dieu ; et les hommes la bénirent, et la choisirent pour y bâtir une maison de Dieu. »

Quelle charmante tradition ! Comme elle respire la naïve bonté des mœurs patriarcales ! comme l’inspiration qui vient aux hommes de consacrer à Dieu un lieu où la vertu a germé sur la terre est simple, antique et naturelle ! J’ai entendu chez les Arabes des centaines de légendes de cette nature. On respire l’air de la Bible dans toutes les parties de cet Orient.

L’aspect de la vallée de Josaphat est conforme à la destination que les idées chrétiennes lui assignent. Elle ressemble à un vaste sépulcre, trop étroit cependant pour les flots du genre humain qui doivent s’y accumuler. Dominée de toutes parts elle-même par des monuments funèbres ; encaissée à son extrémité méridionale dans le rocher de Silhoa, tout percé de caves sépulcrales comme une ruche