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seval s’endort à cheval ; la caravane le devance ; nous nous apercevons qu’il est en arrière ; deux coups de fusil retentissent dans le lointain : nous partons au galop pour aller à son secours, en tirant nous-mêmes des coups de pistolet, afin d’effrayer les Arabes. Heureusement il n’avait point été attaqué ; il avait tiré ses deux coups sur des gazelles qui traversaient la plaine. Nous arrivons le soir, sans avoir rencontré une seule goutte d’eau, près du village arabe de El-Mukhalid. Un immense sycomore, jeté comme une tente naturelle, sur le flanc d’une colline nue et poudreuse, nous attire et nous sert d’abri. Nos Arabes vont au village demander le chemin de la fontaine ; on la leur indique ; nous y courons tous. Nous buvons, nous nous baignons la tête et les bras ; nous revenons à notre camp, où notre cuisinier a allumé le feu au pied de l’arbre. Son tronc est déjà calciné par les feux successifs des milliers de caravanes qui ont goûté successivement son ombre. Toutes nos tentes et tous nos chevaux sont à l’abri de ses rameaux immenses. Le scheik de El-Mukhalid vient m’apporter des melons ; il s’assied sous ma tente, et me demande des nouvelles d’Ibrahim-Pacha, et quelques remèdes pour lui et pour ses femmes. Je lui donne quelques gouttes d’eau de Cologne, et l’engage à souper avec nous. Il accepte. Nous avons toutes les peines du monde à le congédier.

La nuit est brûlante. Je ne puis tenir sous la tente ; je me lève, et vais m’asseoir auprès de la fontaine, sous un olivier. La lune éclaire toute la chaîne des montagnes de Galilée, qui ondule gracieusement à l’horizon, à deux lieues environ de l’endroit où je suis campé. C’est la plus belle ligne d’horizon qui ait encore frappé mes regards. Les pre-