Page:Lamartine - Œuvres complètes de Lamartine, tome 6.djvu/253

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

notre ignorance. La physionomie des musulmans est tellement pénétrée du sentiment religieux qu’ils expriment par ces gestes, que j’ai toujours profondément respecté leur prière : le motif sanctifie tout. Partout où l’idée divine descend et agit dans l’homme, elle lui imprime une dignité surhumaine. On peut dire :

« Je ne prie pas comme toi, mais je prie avec toi le Maître commun, le Maître que tu crois et que tu veux reconnaître et honorer, comme je veux le reconnaître et t’honorer moi-même sous une autre forme. Ce n’est pas à moi de rire de toi ; c’est à Dieu de nous juger. »

Nous passâmes la matinée à visiter les palais des fils de l’émir, qui sont à peu de distance du sien ; une petite église catholique, toute semblable à nos églises modernes de village en France ou en Italie, et les jardins du palais. L’émir Beschir a fait bâtir un autre palais de campagne à un mille environ de Dptédin. C’est le seul but de ses promenades à cheval, et c’est presque le seul chemin où un cheval, même arabe, puisse galoper sans péril ; partout ailleurs les sentiers qui mènent à Dptédin sont tellement escarpés et suspendus sur les bords à pic de tels précipices, qu’on ne peut y passer sans frémir, même au pas.

Avant de quitter Dptédin et Deïr-el-Kammar, je transcris des notes véridiques et curieuses, que j’ai recueillies sur les lieux, concernant le vieillard habile et guerrier que nous venons de voir.