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20 septembre 1832.


Notre établissement étant complet, je m’occupe d’organiser ma caravane pour le voyage de l’intérieur de la Syrie et de la Palestine. J’ai acheté quatorze chevaux arabes, les uns du Liban, les autres d’Alep et du désert ; j’ai fait faire les selles et les brides à la mode du pays, riches, et ornées de franges de soie et de fil d’or et d’argent. Le respect qu’on obtient des Arabes est en raison du luxe qu’on étale ; il faut les éblouir, pour frapper leur imagination et pour voyager avec une pleine sécurité parmi leurs tribus. Je fais mettre nos armes en état, et j’en achète de plus belles pour armer nos Carvas. Ces Carvas sont des Turcs qui remplacent les janissaires que la Porte accordait autrefois aux ambassadeurs ou aux voyageurs qu’elle voulait protéger : ce sont à la fois des soldats et des magistrats ; ils répondent à peu près aux corps de gendarmerie des États de l’Europe. Chaque consul en a un ou deux attachés à sa personne ; ils voyagent à cheval avec eux ; ils les annoncent dans les villes qu’ils ont à traverser ; ils vont prévenir le scheik, le pacha, le gouverneur ; ils font vider et préparer pour eux la maison de la ville ou des villages qu’il leur a plu de choisir ; ils protégent de leur présence et de leur autorité toute caravane à laquelle on les a attachés ; ils sont revêtus de costumes plus ou moins splendides, selon le luxe ou l’importance de la personne qui les emploie. Les ambassadeurs ou les consuls européens sont les seuls étrangers qui aient le droit d’en avoir ;