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à cinq heures du matin, accompagnés de M. Gropius. — Tout se tait devant l’impression incomparable du Parthénon, ce temple des temples bâti par Setinus, ordonné par Périclès, décoré par Phidias ; — type unique et exclusif du beau, dans les arts de l’architecture et de la sculpture ; — espèce de révélation divine de la beauté idéale reçue un jour par le peuple, artiste par excellence, et transmise par lui à la postérité en blocs de marbre impérissable, et en sculptures qui vivront à jamais. — Ce monument, tel qu’il était avec l’ensemble de sa situation, de son piédestal naturel, de ses gradins décorés de statues sans rivales, de ses formes grandioses, de son exécution achevée dans tous les détails, de sa matière, de sa couleur, lumière pétrifiée ; ce monument écrase, depuis des siècles, l’admiration sans l’assouvir ; — quand on en voit ce que j’en ai vu seulement, avec ses majestueux lambeaux mutilés par les bombes vénitiennes, par l’explosion de la poudrière sous Morosini, par le marteau de Théodore, — par les canons des Turcs et des Grecs ; — ses colonnes en blocs immenses touchant ses pavés, ses chapiteaux écroulés, ses triglyphes brisés par les agents de lord Elgin, ses statues emportées par des vaisseaux anglais. — Ce qu’il en reste est suffisant pour que je sente que c’est le plus parfait poëme écrit en pierre sur la face de la terre ; mais encore, je le sens aussi, c’est trop petit ; l’effet est manqué, ou il est détruit. — Je passe des heures délicieuses couché à l’ombre des Propylées, les yeux attachés sur le fronton croulant du Parthénon ; je sens l’antiquité tout entière dans ce qu’elle a produit de plus divin ; — le reste ne vaut pas la parole qui le décrit ! L’aspect du Parthénon fait apparaître, plus que l’histoire, la grandeur colossale d’un peuple. Périclès ne doit pas mourir ! Quelle civilisation sur-