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III

Non ! de tous ces grands cris j’ai parcouru la gamme.
De la plainte des sens jusqu’aux langueurs de l’Ame ;
Chaque fibre de l’homme au cœur m’a palpité,
Comme un clavier touché d’une main lourde et forte,
Dont la corde d’airain se tord, brisée et morte,
Et que le doigt emporte
Avec le cri jeté !

Pourquoi donc sous mon souffle et sous mes doigts rebelles,
O harpe, languis-tu comme un aiglon sans ailes ?
Tandis qu’un seul accord du barde d’Israël
Fait après deux mille ans dans les chœurs de nos fêtes
Ondoyer tout un peuple aux accents des prophètes.
Flamboyer les tempêtes,
Et se fendre le ciel ?

Ah ! c’est que la douleur et son brûlant délire
N’est pas le feu du temple et la clef de la lyre !
C’est que de tout foyer ton amour est le feu ;
C’est qu’il t’aimait, Seigneur, sans mesure et sans doute.
Que son âme à tes pieds s’épanchait goutte â goutte,
Et qu’on ne sait, quand on l’écoute,
S’il parle à son égal ou s’il chante à son Dieu !

Jamais l’amour divin, qui soulève le monde
Comme l’astre des nuits des mers soulève l’o