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C’était l’unique fleur de l’Éden de ma vie
Où le parfum du ciel ne se corrompit pas,
Le seul esprit d’en haut que la mort assouvie
N’eût point éloigné de mes pas !
C’était de mes beaux jours la plus pure pensée,
Que Dieu d’un vœu d’amour me permit d’animer.
Pour que dans ce beau corps mon âme retracée
Pût se réfléchir et s’aimer !

Je la vois devant moi, la nuit, comme une étoile
Dont la lueur me cherche et vient me caresser ;
Le jour, comme un portrait détaché de la toile
Qui s’élance pour m’embrasser !
Je la vois, s’enfuyant dans mon sein qui l’adore,
Faire éclater de là son rire triomphant,
Ou, du sein de sa mère, à mon baiser sonore
Apporter ses lèvres d’enfant !

Je la vois, grandissant sous les palmiers d’Asie,
Se mûrir aux rayons de ces soleils nouveaux,
Et rêveuse déjà, lutter de poésie
Avec le chant de ses oiseaux.
J’entends à son insu se révéler son âme
Dans ces vagues soupirs d’un cœur qui se pressent.
Préludes enchantés de ces accords de femme,
Où l’âme va donner l’accent !

Oui, pour revivre encor, je vis dans son image :
Le cœur plein d’un objet ne croit pas à la mort.
Elle est morte pour vous qui cherchez son visage,
Mais pour nous elle est près, elle vit, elle dort ;