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FIOR D’ALIZA.

que l’amour cependant, une fois qu’on a compris qu’on s’aime et qu’on découvre tout étonnée dans le cœur d’un autre le même secret qu’on se cachait à soi-même, et que ces deux secrets n’en font plus qu’un entre deux ! Il paraissait aussi enivré du peu que je lui disais par mes mots entrecoupés, par mon front baissé, par mon agitation, que je l’étais moi-même, seulement par le son timide de sa voix.

CCXXV

L’heure, qui sonna midi au cadran de la tour, nous rappela à peine que le temps comptait encore pour nous, car nous nous croyons vraiment dans le temps qui ne compte plus, dans l’éternité.

— Adieu ! lui dis-je en retirant ma main de la sienne ; voici ce qu’il faut faire, vois-tu, Hyeronimo : il faut penser à ta chère âme comme un homme qui va mourir, bien que nous ne mourrons pas, je le crois fermement. Parmi tous ces moines, ces pénitents et ces prêtres qui vont venir tous les jours pour t’exhorter et te préparer à la mort par les sacrements, il faut dire que tu préfères les frères de l’ordre des Camaldules, qui t’ont enseigné la religion dans ton enfance, et que tu serais plus résigné et plus content si l’on pouvait t’accorder pour confesseur le vieux frère Hilario, du couvent de la montagne, dont tu as l’habitude, et qui