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CHAPITRE VI.

l’officier accusateur du conseil de guerre conclure son long discours par ce mot terrible : « la mort ! » sous les balles des sbires, sur la place des exécutions de Lucques, et son corps livré au bourreau, comme celui d’un décapité par la hache, et enseveli par les frères de la Miséricorde dans le coin du Campo-Santo réservé aux meurtriers, avec la croix rouge sur leur sépulcre. Il ne reste plus qu’à lui signifier son jugement et à le faire ratifier par monseigneur le duc.

Mais, me dit-elle, garde-toi de rien dire dans la prison de ce que je te dis là, mon enfant ; les meurtriers même sont des chrétiens, le repentir leur appartient comme à nous tous pour racheter là-haut le crime qu’on ne leur peut pas remettre ici-bas. Il ne faut pas les faire mourir autant de fois qu’il y a de minutes entre le jour où on les condamne et le jour où on les frappe avec le fer ou avec le plomb. Quand le duc a signé le jugement, quand il n’y a plus d’appel et plus de remède à leur sort, on les instruit avec ménagement du supplice qui les attend ; on leur laisse quatre semaines de grâce entre l’arrêt et l’exécution pour bien se préparer avec leur confesseur a paraître résignés et purifiés devant Dieu, et pendant tout cet intervalle de temps, qui s’écoule entre la signification du jugement et la mort, on les traite non plus comme des criminels qu’on maudit, mais comme des malheureux déjà innocentés par le supplice qu’ils vont subir.

C’est une belle loi de Lucques, n’est-ce pas, celle-là, c’est une loi de vrais chrétiens qui donne le temps de reve-