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CHAPITRE IV.

sortait pour mener les chèvres à la feuille, l’appelait pour l’accompagner ; avec lui, elle n’avait plus peur.

CIII

Cependant, un matin qu’il était allé dénicher des œufs de faisan dans les bruyères au plus haut des montagnes, derrière l’ermitage des Camaldules, elle eut bien plus peur, et nous avec elle, hélas !

Une bande de bûcherons de la plaine, armés de leurs grandes haches et de leurs longues scies d’acier pour abattre et débiter le bois dans les forêts, parut avec l’aurore au pied du gros châtaignier ; ils s’assirent en cercle autour des racines, aiguisèrent leur hache et leur scie sur des pierres de grès, débouchèrent leurs fiasques de vin, se coupèrent des tranches de pain et de fromage, et se mirent à déjeuner gaiement tout près de nous.

Je m’approchai timidement d’eux, et je leur demandai poliment qu’est-ce donc qu’ils venaient faire si haut et si loin dans une partie des montagnes ou jamais la hache des bûcherons n’avait retenti depuis que le monde est monde.

— Vous allez le savoir, mon ami, me répondit une voix qu’il me sembla reconnaître à son accent de méchanceté hypocrite (ma belle-sœur, qui était accourue à son tour