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FIOR D’ALIZA.

CI

C’est ainsi qu’il nous consola, en prenant part, par ses larmes, à la mort de notre treille, et qu’il tourna notre colère en miséricorde pour nos ennemis. Puis :

— Voyons donc, dit-il, ce fatal papier qui vous a dépossédés de l’héritage des Zampognari, que j’ai toujours cru aussi à vous que ce rocher est à la montagne, ou que cette mousse est à ce rocher. Je suis bien vieux, j’ai plus de quatre-vingt-dix ans d’âge ; qui sait peut être si le bon Dieu ne m’a laissé vieillir ainsi inutile à moi et au monde, que pour rendre témoignage pour les pauvres Zampognari contre quelques traits de plume de scribe, qui cherche des procès pour gagner son pain dans des paperasses, comme l’écureuil cherche la noisette dans la mousse en retournant les feuilles mortes ? Donnez-moi ce papier : la première fois que j’irai encore à Lucques, je le ferai voir au professeur de droit Manzi, mon vieil ami.

Le père Hilario emporta le papier, et nous n’y pensâmes plus que pour pleurer notre vendange égrenée à terre ; les oiseaux du ciel eux-mêmes semblèrent la pleurer avec nous ; les passereaux, les grives, les colombes, les merles, quand ils s’aperçurent que les pampres noircissaient, que les feuilles tombaient en été comme après une