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CÉSAR.

de toutes les gloires. Ses premiers discours au Forum, devant le peuple, ne lui laissèrent pour rivaux que les premiers orateurs de Rome, dans un temps où Rome avait le vieux Antoine et le divin Cicéron. Cicéron lui-même, dans son traité de l’Orateur, dédié à Brutus, parle, sans faveur comme sans envie, de la parole éclatante, grandiose et opulente de César. « Je n’en connais aucun dont on puisse dire que César est le second, » dit-il. Puis, pour convaincre Brutus, qui devait un jour étouffer cette éloquence sous le poignard : « Quel orateur, ajoute Cicéron, pourriez-vous lui préférer parmi ceux qui n’ont cultivé que cet art seul de parler ? Qui pourrait l’emporter sur lui pour l’abondance et la vigueur de la pensée ? qui, pour l’élégance ou la splendeur des expressions ? »

Les discours écrits de lui qui existaient encore au temps d’Auguste, soit au Forum, soit au sénat, soit au camp devant les soldats, avant les batailles d’Espagne, ne retraçaient qu’imparfaitement, dit-on, la grâce, la force et l’abondance de ses harangues. Cicéron et d’autres contemporains disent que ses poésies égalaient son éloquence, et qu’elles ne l’auraient laissé inférieur à aucun poëte romain, dans un temps qui couvait déjà Horace et Virgile. Un poëme sur les voyages, une ode à Hercule, une tragédie d’Œdipe, l’avaient exercé à la poésie didactique, lyrique et dramatique. Ces essais se sont absorbés dans sa gloire comme les rayons dans l’astre couché. On ne peut en juger que par l’impression qu’ils firent sur Cicéron. L’impression de Cicéron est un jugement aussi compétent que celui de tout un siècle.

Quant à ses opinions religieuses, elles étaient telles que les peut avoir un homme qui ne se proposait dès son adolescence que deux fins dans la vie : la volupté et l’ambition. Il professait en morale cet axiome qui condamne les petits crimes et absout les grands : que, toutes les fois