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sa grand’mère et à se séparer de celui qui a donné trop d’ombrage à l’opinion et trop de prétexte à la malignité publique. Les complices de l’enlèvement seront relâchés aussitôt que le prince aura retiré sa plainte. Quant à vous, monsieur, il ne vous demande qu’un long éloignement de Rome pour prix du sacrifice qu’il fait de ses droits et de son ressentiment. Rome verra, dit-il, quel est le plus généreux et le plus véritablement ami de cette enfant, de son prétendu tyran qui lui conserve l’honneur et qui lui rend la possession d’elle-même, ou de ce jeune étranger qui sacrifie à son amour la personne aimée.

« Après avoir ainsi parlé, ils se sont retirés. Ils m’ont prié de réfléchir seul et sans influence étrangère à mon devoir et aux propositions du prince et du gouvernement.

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« Je n’ai pas réfléchi, j’ai crié de douleur en me précipitant sur le pavé de ma casemate… Je tenais deux vies dans ma main : celle de Régina et la mienne, j’ai sacrifié la mienne !… Qu’elle m’accuse, qu’elle me haïsse ! qu’elle me maudisse ! n’importe ! Tu me connais ; quand mon devoir m’est tracé, même à travers le feu et la mort, j’y passe !

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« À l’heure où tu recevras ceci, j’aurai quitté Rome. Régina pourra y rentrer. Sa famille et la société l’accueilleront comme elle mérite d’être accueillie. Elle sera la maîtresse de sa vie, la grâce de la maison de sa granmère, l’idole de ce pays de la beauté. Qu’elle m’oublie ! c’est Clotilde elle-même qui le lui commande par ma voix ! Un jour peut-être.

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« Je pars après-demain pour l’Espagne, où je vais prendre du service dans un régiment de la garde royale,