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QUATORZIÈME LETTRE


Rome.


« Le bonheur était trop complet pour être durable… C’est ta pitié maintenant qu’il me faut. La comtesse Livia a reçu du gouvernement l’ordre de rentrer à Rome, d’observer la vie cloîtrée du couvent avec sa petite-fille, ou de la laisser seule au couvent jusqu’au retour du prince ***, qui réclamera sa femme. Cela vient des amis du prince, qui ont été informés et qui se sont plaints des assiduités d’un étranger dans la famille. Les ordres de police ici sont absolus ; il a fallu obéir. La comtesse a quitté Tivoli ; elle est rentrée dans son palais à Rome, afin d’avoir la liberté de réclamer et de faire agir ses amis auprès du gouvernement. Régina est enfermée seule avec la nourrice dans l’enceinte du couvent. Je suis parti ostensiblement pour Florence, d’après ses conseils, pour enlever tout prétexte d’accusation et de réclusion contre Régina et la comtesse. Mais, arrivé à Terni, j’ai fait poursuivre de nuit à ma calèche la route de Florence ; un jeune Napolitain de mes amis, qui va à Paris, y a pris ma place. Je suis revenu seul et sous un autre nom à Rome. Je ne suis pas rentré dans la ville, pour que mon palais vide trompât la surveillance du gouvernement. Je vis caché dans une maison de jardinier, hors des murs, du côté de Saint-Paul, sur un chemin de traverse, chez le frère de la nourrice de Régina. J’ai une chambre dont la fenêtre ouvre sur la campagne,