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main. On dit que vous m’avez remplacée avec tant d’obligeance auprès de mon pauvre Jean, que, s’il revient de cette maladie, c’est bien à vous que je devrai son salut en ce monde. Qu’est-ce que je pourrai jamais faire pour me reconnaître envers vous, mademoiselle ? Hélas ! je n’ai rien à vous donner.

« — Qui sait, ma pauvre femme ? répondit Geneviève. Peut-être, si Dieu conserve la vie à votre mari, aurez-vous à me donner autant que je vous donne. »

Elle pensait à l’enfant en parlant ainsi, mais Luce n’y comprenait rien.

« — Et vous, monsieur, dit Luce, se tournant vers moi, que pourrons-nous jamais faire pour vous rendre la grande complaisance que vous avez eue pour de pauvres gens comme nous ?

« — Le cœur est la monnaie de ceux qui n’en ont point d’autre, lui répondis-je avec un sourire attendri, par lequel je voulais lui cacher mon inquiétude sur l’état de son mari ; et c’est la meilleure, comme dit l’Évangile. Je serai assez payé de mes pas en descendant la montagne et de quelques jours perdus à Voiron, si Dieu vous rend votre mari. »


CXLVIII


Mais, hélas ! la Providence ne paraissait pas vouloir exaucer nos souhaits pour le rétablissement de Jean. Le soir du neuvième jour il fut à l’agonie. On appela un prêtre pour bénir son départ de la terre. Le médecin vint essayer en vain les derniers cordiaux sur sa faiblesse croissante. Il s’approcha de Geneviève et de Luce, qui pleuraient autant l’une que l’autre au pied du lit, Luce à cause de son mari,