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CXXI


Ah ! monsieur, que j’ai été heureuse, et que le bon Dieu m’avait bien ménagé après tant d’ennuis la compensation de mes peines ! Pensez donc, un homme si bon, si charitable, si aumônier, qu’il ne se gardait seulement pas une once de sel ou une salade du jardin, si je n’y avais pas pensé pour lui ! Jamais un mot plus haut que l’autre : toujours triste, mais toujours résigné. Une cuisine à faire comme pour une mouche ! Du pain sur la table pour quiconque frappait à la porte. Une vache, une chèvre, un chien, des oiseaux à soigner. Des ruches entourées de giroflées sous la fenêtre, des pots de fleurs sur la galerie. La paix, tout le jour assise, là, ou les pieds au soleil sur le pas de la porte ; les enfants à faire épeler leur croix de par Dieu, et de pauvres femmes venant causer avec leurs rouets, l’hiver, sous la voûte sombre du four ! Rien à faire que les cierges à allumer aux baptêmes et les dragées à recevoir des parrains et des marraines en sortant de l’église. Tous les matins et tous les soirs la prière, tant que cela me plaisait dans le cœur. J’étais heureuse, monsieur, cela ne pouvait pas durer.


CXXII


« — Mais, ma pauvre Geneviève, lui dis-je, qu’allez-vous devenir à présent ?

« — Ah ! monsieur, je ne m’en inquiète pas, répondit-