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flocons dans la chambre, comme une folle qui déchire sa coiffe et qui jette ses plus belles dentelles au visage de ses gardiens. La porte était heureusement fermée, et une seule petite lampe éclairait notre chambre ; Josette ne m’avait pas vue glisser de ma chaise, derrière le comptoir, et accroupie dans l’ombre, dans un coin du mur.

« À son aspect, à son cri, à son geste égaré et furieux, je compris qu’elle savait tout, monsieur. Je m’élançai vers elle, je l’entourai de mes deux bras et je la jetai sur son lit. Je n’eus pas le courage de lui faire un reproche. Hélas ! la pauvre enfant ! elle était bien assez malheureuse ! Elle ne me voyait seulement pas ; elle croyait que j’étais M. Septime. Elle m’embrassait, elle me parlait comme si j’eusse été lui. « Oh ! tu n’es pas mort, disait-elle en riant d’un rire étrange ; oh ! dis-moi que tu n’es pas mort ! N’est-ce pas, c’est ta main qui passe sur mon front si doucement ?… » Enfin, que sais-je ? Toutes sortes de tendresses, de badineries et de caresses de mots que le délire peut mettre sur les lèvres. Puis elle me reconnaissait par moments, elle mettait son doigt sur ma bouche, et elle me disait : « Chut ! tu ne diras rien de ce que tu sais ; c’est un secret. Nous sommes mariés, vois-tu ; mais il ne veut pas qu’on le sache jusqu’après la campagne, où il le dira à sa mère et où il me mènera dans sa maison. »


LXIV


« Pauvre enfant ! elle croyait tout cela ! C’était si jeune, si simple, si innocent, voyez-vous !

« Puis, tout à coup, elle se levait sur son séant, tout échevelée, avec les yeux plus luisants que la lampe ; elle me