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XL


« Josette finit par dormir aussi tranquillement que dans son berceau quand elle était petite et que je la berçais du pied en chantant de la voix ; moi, non. Le jour commençait à glisser sur le lit ; j’étais contente en la regardant si jolie, si jolie, avec ses beaux cheveux, où il y avait un peu de sang, tout déroulés et tout mêlés sur le traversin par l’agitation de la nuit ; et puis, quand je revenais à penser à Cyprien, le cœur me fondait, et je devenais tout eau dans mes yeux.

« Je n’aurai jamais le courage de lui dire : « Cyprien, votre Geneviève est une traîtresse ! » Les paroles m’étoufferaient de chagrin et de honte ! Non ; il faut pourtant l’avertir, le pauvre garçon ! Je vais le lui écrire, le papier ne rougit pas ; allons !

« Je me levai doucement, doucement, pour ne pas réveiller Josette, qui avait besoin de se refaire, et je me mis à écrire à Cyprien vers la fenêtre d’où l’on voit la montagne. Ah ! j’usai bien des feuilles de papier ce jour-là, monsieur ; car, je pleurais tant, je pleurais tant, que chaque fois qu’une ligne était faite, il fallait en faire une autre, parce que le papier était tout mouillé, je dus bien recommencer dix fois ; tant que j’eus de l’eau dans les yeux. Enfin, à la fin des fins, j’en fis une qui était à moitié lisible.

« — Pauvre Geneviève ! dis-je en l’interrompant. Mais, que pouviez-vous dire à Cyprien dans cette lettre pour vous