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Margellina un surcroît de provisions de pain, de vin, de fromages secs et de fruits. À la tombée du jour nous l’aidâmes à mettre sa barque à flot et nous partîmes.


IV


La première nuit fut délicieuse. La mer était calme comme un lac encaissé dans les montagnes de la Suisse. À mesure que nous nous éloignions du rivage, nous voyions les langues de feu des fenêtres du palais et des quais de Naples s’ensevelir sous la ligne sombre de l’horizon. Les phares seuls nous montraient la côte. Ils pâlissaient devant la légère colonne de feu qui s’élançait du cratère du Vésuve. Pendant que le pêcheur jetait et tirait le filet, et que l’enfant, à moitié endormi, laissait vaciller sa torche, nous donnions de temps en temps une faible impulsion à la barque, et nous écoutions avec ravissement les gouttes sonores de l’eau, qui ruisselait de nos rames, tomber harmonieusement dans la mer comme des perles dans un bassin d’argent.

Nous avions doublé depuis longtemps la pointe du Pausilippe, traversé le golfe de Pouzzoles, celui de Baïa, et franchi le canal du golfe de Gaëte, entre le cap Misène et l’île de Procida. Nous étions en pleine mer ; le sommeil nous gagnait. Nous nous couchâmes sous nos bancs, à côté de l’enfant.

Le pêcheur étendit sur nous la lourde voile pliée au fond de la barque. Nous nous endormîmes ainsi entre deux lames, bercés par le balancement insensible d’une mer qui faisait à peine incliner le mât. Quand nous nous réveillâmes, il était grand jour.