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Quand un fleuve écumant qu’ont vu couler les âges,
Disparu tout à coup, laisse à nu ses rivages ?
Un fleuve a disparu ! mais ces trônes du jour,
Ces gigantesques monts crouleront à leur tour ;
Mais dans ces cieux, semés de leur sable splendide,
Tous ces astres éteints laisseront la nuit vide ;
Mais cet espace même à la fin périra,
Et de tout ce qui fut, un jour, rien ne sera.
Rien ne sera, Seigneur ! Mais toi, source des mondes,
Qui fais briller les feux, qui fais couler les ondes,
Qui sur l’axe des temps fais circuler les jours,
Tu seras ! tu seras ce que tu fus toujours !
Tous ces astres éteints, ces fleuves qui tarissent,
Ces sommets écroulés, ces mondes qui périssent,
Dans l’abîme des temps ces siècles engloutis,
Ces temps et cet espace eux-même anéantis,
Ce pouvoir qui se rit de ses propres ouvrages,
À Celui qui survit ce sont autant d’hommages ;
Et chaque être mortel, par le temps emporté,
Est un hymne de plus à ton éternité !

Italie ! Italie ! ah ! pleure tes collines,
Où l’histoire du monde est écrite en ruines !
Où l’empire, en passant de climats en climats,
A gravé plus avant l’empreinte de ses pas ;
Où la gloire, qui prit ton nom pour son emblème,
Laisse un voile éclatant sur ta nudité même !
Voilà le plus parlant de tes sacrés débris !
Pleure ! un cri de pitié va répondre à tes cris !
Terre que consacra l’empire et l’infortune,
Source des nations, reine, mère commune,
Tu n’es pas seulement chère aux nobles enfants
Que ta verte vieillesse a portés dans ses flancs ;