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Redescendez, mes yeux, des célestes campagnes !
Voyez, sur ces rochers que l’écume a polis,
Voyez étinceler aux flancs de ces montagnes
Tous ces torrents sans source et ces fleuves sans lits.

La cascade qui pleut dans le gouffre qui tonne
Frappe l’air assourdi de son bruit monotone ;
L’œil fasciné la cherche à travers les rameaux,
L’oreille attend en vain que son urne tarisse :

De précipice en précipice

Débordant, débordant à flots toujours nouveaux,
Elle tombe, et se brise, et bondit, et tournoie,
Et, du fond de l’abîme où l’écume se noie,
Se remonte elle-même en liquides réseaux,
Comme un cygne argenté qui s’élève, et déploie

Ses blanches ailes sur les eaux !


Que j’aime à contempler dans cette anse écartée
La mer qui vient dormir sur la grève argentée,

Sans soupir et sans mouvement !

Le soir retient ici son haleine expirante,
De crainte de ternir la glace transparente

Où se mire le firmament.


De deux bras arrondis, la terre qui l’embrasse
À la vague orageuse interdit cet espace,

Que borde un cercle de roseaux ;

Et d’un sable brillant une frange plus vive
Y serpente partout entre l’onde et la rive,

Pour amollir le lit des eaux.