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— Scélérats ! dit Memphid le bras déjà levé,
Partager avec vous ce que seul j’ai trouvé ! »
Son imprécation expira sur sa bouche.
La troupe s’entendit d’un seul coup d’œil farouche :
Avant que de leurs pieds le superbe géant
Se fût, pour les parer, placé sur son séant,
Six masses à la fois sur sa tête lancées
Brisèrent d’un seul coup son crâne et ses pensées.
Le géant assommé, tombant sans mouvement,
De la rage à la mort n’eut qu’un gémissement ;
Les racines du sol tremblèrent de sa chute.
Aux éclairs de la torche, aux clameurs de la lutte,
Daïdha réveillée ouvrit les yeux. L’horreur
S’échappa de son âme en un cri de terreur ;
Comme un tronçon dormant de serpent qu’un pied presse
Du seul effort des nerfs sur lui-même se dresse ;
Au sol qui la portait sans appuyer la main,
Elle fut sur ses pieds debout d’un bond soudain,
Et, trompant des chasseurs le cercle, qu’elle brise,
Entre leurs doigts ouverts glissa comme une brise.
Mais un d’eux à l’instant élancé sur ses pas,
Dépliant le filet qui flottait sur son bras,
Pour l’atteindre en courant le lance sur sa proie :
En volant dans les airs le filet se déploie,
Et des mailles de fer le nuage étouffant
D’une prison mobile enveloppe l’enfant.
L’horrible bande alors à quelques pas s’arrête ;
Ils se rangent assis autour de leur conquête,
D’un œil cupide et dur contemplant sans remords
Daïdha qui s’épuise en stériles efforts.