Page:Lamartine - Œuvres complètes de Lamartine, tome 16.djvu/427

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Leur âme s’exhalait dans un ardent soupir ;
Leurs touchants entretiens ne pouvaient s’assoupir ;
Pour s’enivrer du son de la voix retrouvée,
Ils faisaient mille fois gazouiller leur couvée ;
Et pour saisir l’épaule ou le cou de l’amant,
Daïdha dépliait son bras déjà dormant ;
Cédar, pour écouter le souffle de sa bouche,
S’appuyait sur le coude au sable de sa couche.
Le sommeil du bonheur enfin ferma leurs yeux.

Astres, amis du cœur, qui regardiez des cieux !
De l’éclatante nuit brillantes providences,
Étoiles où montaient leurs chastes confidences !
Yeux ouverts du Seigneur sur l’ombre des déserts !
Esprits qui remplissez l’air, la terre et les mers ;
Anges de tous les noms, mystérieux fantômes
Dont le monde invisible est plus plein que d’atomes ;
Ministres du Très-Haut présent dans tous les lieux,
Qui passiez dans ces vents, qui luisiez dans ces feux,
Oh ! pourquoi, déjouant des desseins sacriléges,
N’avez-vous pas gardé ces beaux pieds de tous piéges ?
Pourquoi, pourquoi laisser jusqu’au réveil du jour
S’assoupir ces deux cœurs dans l’embûche d’amour ?
N’avaient-ils point d’ami dans le monde céleste
Qui pût les éveiller d’une idée ou d’un geste ?
Pour l’incompréhensible et sainte volonté,
La ruine de l’homme est-elle volupté ?
Mais silence : envers Dieu la plainte est une offense ;
Ses anges ne sont saints que par l’obéissance !…