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De son livre divin les voix, au regard peintes,
Réveillant dans l’esprit des mémoires éteintes,
Et rappelant au Dieu que l’impie a quitté
Le monde enseveli dans son iniquité ;
Leurs jours délicieux dans cet Éden céleste ;
Le char volant des dieux… Elle savait le reste.

À ces touchants récits ivre d’attention,
Lakmi laissait son sein sans respiration.
Vers l’être merveilleux la figure penchée,
Aux lèvres de Cédar la prunelle attachée,
S’étonnant, frissonnant, admirant tour à tour,
Par chacun de ses sens elle aspirait l’amour ;
Elle voyait grandir, resplendir à mesure
Du céleste captif la touchante figure.
Chaque mot l’enfonçait plus avant dans son cœur ;
Elle plongeait en lui son œil noir et rêveur ;
Comme après l’avoir lue on relit une page,
Elle l’interrompait au plus tendre passage,
Et lui faisait redire en recueillant sa voix
Des choses et des mots déjà redits cent fois ;
De ses amours surtout la naissance et l’extase,
Comme après avoir bu l’on égoutte le vase.
Elle voulait savoir par quel attrait vainqueur
Daïdha de Cédar avait conquis le cœur,
Quels mots elle employait pour enchanter son âme ;
Ce qui l’avait ravi dans sa beauté de femme ;
Et si son cœur, toujours d’un même amour rempli,
N’avait jamais trouvé la langueur ou l’oubli.