Page:Lamartine - Œuvres complètes de Lamartine, tome 16.djvu/312

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Et, suivant attentifs les mouvements du corps,
Au niveau de leur lèvre élevaient ces supports.
Car ces monstres d’orgueil, enivrés d’esclavage,
De leurs membres sacrés ne faisaient nul usage,
Craignaient en s’en servant de les prostituer,
Et ne levaient jamais leurs bras que pour tuer !


Pour leurs goûts dépravés profanant la nature,
L’art changeait en forfaits jusqu’à leur nourriture ;
Demandant un tribut à tous les éléments,
Ils écumaient le sel de tous les aliments.
Pour charmer leur festin, tuant par hécatombes,
La moelle des agneaux, la langue des colombes,
Dans ce qui broute, ou nage, ou vole sous le ciel,
Ce qui plaît au palais de plus substantiel
Composait l’aliment de ces banquets célestes,
Et le peuple affamé se jetait sur les restes ;
La sève qu’on ravit aux rameaux mutilés,
Et des baumes en fleurs les parfums distillés,
Et les feux du soleil, dont les liquides flammes
Des veines du pavot coulent dans les dictames,
Mêlés dans leur breuvage aux larmes de l’encens,
D’une ivresse éternelle incendiaient leurs sens.


Disputant ce service aux plus belles esclaves,
Et goûtant avec lui les mets les plus suaves,
Lakmi servait Nemphed, à ces festins sacrés,
De secrets aliments dans l’ombre préparés.