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Dans un palais touchant aux célestes demeures,
Cent esclaves choisis lui variaient les heures :
Les uns sous ses regards faisaient germer les fleurs,
Pour revêtir le sol de suaves couleurs ;
Les autres, de l’air même humectant les haleines,
Vidaient et transvasaient les urnes toujours pleines,
Ou, des arbres trempés agitant les rameaux,
Donnaient au vent le froid et la senteur des eaux ;
Ceux-là faisaient pleuvoir, d’arcades en arcades,
Sur les gazons perlés l’écume des cascades ;
Ceux-ci lui mariaient, au caprice des sens,
Les saveurs du festin tout embaumé d’encens ;
D’autres, pour la porter dans ses célestes chambres,
En corbeille animée assouplissaient leurs membres,
De peur que sous le poids de son corps étendu
Le muscle de leurs bras n’eût un pli défendu.


Lakmi multipliait, fidèle à la coutume,
L’éclat de sa beauté par l’éclat du costume,
Et dans des yeux ravis longuement s’admirait
En face du cristal où flottait son portrait ;
Non que l’enivrement qu’elle avait d’elle-même
Fût ce besoin secret de charmer ce qu’on aime,
Mais ce besoin jaloux d’écraser d’un coup d’œil
Des rivales beautés la malice et l’orgueil.
Elle sortait de à séduisante et rieuse ;
Éblouissant d’attraits la foule curieuse.
Abeille matinale à butiner son thym,
Couvrant son cœur profond d’un visage enfantin,