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De génie et de grâce également douée,
Belle, tendre, pensive, et pourtant enjouée,
Savante en tous ces arts dont la corruption
S’efforçait d’exalter l’ardente passion,
À trouver dans les mots de si brillants symboles
Que la nature vit et sent dans les paroles,
À composer, des sucs exprimés par ses mains,
Des philtres qui versaient des songes surhumains,
À simuler du geste ou l’amour ou la haine
Qu’écrit la passion sur la figure humaine,
À passer à son gré du rire faux aux pleurs,
À nouer ses cheveux en y tressant des fleurs,
À donner au contact de ses lèvres errantes
L’odeur et le frisson des brises enivrantes,
À fasciner tout œil tombé dans son regard,
À remuer le cœur, même au sein du vieillard.


Nemphed, qui de ces dons décorait son ouvrage,
Les faisait servir tous à son infâme usage.
Bien qu’il fît son jouet de cet être charmant,
Ce jouet dans ses mains était un instrument,
Instrument de forfaits, dont la grâce et l’enfance
Écartaient de l’esprit jusqu’à la défiance.
C’est Lakmi qui semait, par de rusés discours,
La discorde et l’envie, atmosphère des cours ;
Qui fomentait la haine et soufflait les cabales
Pour nouer ou briser des intrigues rivales.
C’est elle qui, sous l’air d’un enfant indiscret,
Laissait comme échapper de son cœur un secret ;