Page:Lamartine - Œuvres complètes de Lamartine, tome 16.djvu/276

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Et dans les libres flots d’un transparent éther
Sur le ciel des géants commença de flotter.

Déjà, comme un fanal qui sur l’écueil vacille,
Une vaste lueur ondoyait sur sa quille !
C’étaient les mille feux de l’immense Babel,
Comme un rouge volcan reflété dans le ciel.
L’esquif aérien, guidé par cette flamme,
De l’air sous son sillon faisait gronder la lame ;
Le timon frémissait dans la robuste main,
Il plongea lentement dans ce cratère humain ;
Comme de grandes mers qui battent leurs rivages,
Un bruit sourd et croissant montait jusqu’aux nuages.
Cédar et Daïdha regardaient autour d’eux,
Ne sachant d’où venait ce bruit tumultueux ;
Involontairement ils détournaient la tête :
Ils croyaient approcher d’une grande tempête,
Et s’étonnaient de voir dans un ciel de cristal
Le navire flottant bercé d’un souffle égal.
Par degrés cependant leur oreille assourdie,
Se penchant du côté de l’immense incendie,
Dans l’orageux roulis de ce bruit grossissant,
Crut de la voix de l’homme reconnaître l’accent :
Et plus le bruit montait et croissait dans les nues,
Plus leur âme sondait ces clameurs inconnues.

De ces grands murs remplis par une nation,
C’était au soir d’un jour la respiration,