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Émerveillés d’amour pour un maître si doux ;
Devant l’ombre de Dieu se mettant à genoux,
Ou, l’un debout devant l’autre qui s’agenouille,
S’essayant à prier comme l’oiseau gazouille ;
Puis, quand leurs yeux venaient à rencontrer leurs yeux,
Quand des saintes leçons le reflet sérieux
Par degrés sur leurs fronts commençait à s’éteindre,
Redevenus enfants et courant pour s’atteindre,
De rires et de jeux, de repos et d’amour,
Ils enchantaient ces lieux et remplissaient le jour.
Ainsi coulait en miel leur vie intérieure,
Et, comme dans le ciel, le temps n’avait plus d’heure.
Oh ! pourquoi ces jours d’or ne durèrent-ils pas ?
L’ange aurait envié leur exil d’ici-bas.

C’était l’heure où le soir fait tout pâlir et taire
Et semble dérouler la nuit d’un sanctuaire,
Où l’âme a, comme l’arbre, une ombre qui s’étend,
De ses impressions crépuscule flottant,
Où la pensée en soi profonde et recueillie
Dans l’intime entretien de l’esprit se replie,
Et, semblable au parfum qui cherche à s’élever,
Veut aimer, ou chanter, ou prier, ou rêver.

Les deux époux lassés de joie et d’allégresse,
Marchant dans l’herbe en fleurs foulée avec ivresse,
Et brisant, en passant, les rameaux lourds de fruit,
Se rapprochaient de l’antre à petits pas, sans bruit,