Page:Lamartine - Œuvres complètes de Lamartine, tome 16.djvu/258

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

» Vous ne déroberez jamais le champ d’autrui,
Car ce que l’homme a fait de sa sueur, c’est lui !
Vous ne porterez pas un désir sur sa femme,
Car la femme de l’homme est son corps et son âme ;
Dérober ce trésor de son cœur à ses bras,
C’est lui voler la part de son ciel ici-bas !
· · · · · · · · · · · · · · · · · · · · · · · · · · · · · · · · · · · · · · · ·
· · · · · · · · · · · · · · · · · · · · · · · · · · · · · · · · · · · · · · · ·
» Vous ferez alliance avec les brutes même :
Car Dieu, qui les créa, veut que l’homme les aime :
D’instinct, d’intelligence à différents degrés
Elles ont eu leur part, vous la reconnaîtrez ;
Vous lirez dans leurs yeux, douteuse comme un rêve,
L’aube de la raison qui commence et se lève.
Vous n’étoufferez pas cette vague clarté,
Présage de lumière et d’immortalité ;
Vous la respecterez, car l’ange la respecte.
La chaîne à mille anneaux va de l’homme à l’insecte :
Que ce soit le premier, le dernier, le milieu,
N’en insultez aucun, car tous tiennent à Dieu !
· · · · · · · · · · · · · · · · · · · · · · · · · · · · · · · · · · · · · · · ·
· · · · · · · · · · · · · · · · · · · · · · · · · · · · · · · · · · · · · · · ·
» Ne les outragez pas par des noms de colère ;
Que la verge et le fouet ne soient pas leur salaire.
Pour assouvir par eux vos brutaux appétits,
Ne leur dérobez pas le lait de leurs petits ;
Ne les enchaînez pas serviles et farouches,
Avec des mors de fer ne brisez pas leurs bouches ;
Ne les écrasez pas sous de trop lourds fardeaux.
Qu’ils vous lèchent la main et vous prêtent leur dos.