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» C’est le froment du ciel, c’est la semence vraie
» Dont les épis un jour étoufferont l’ivraie,
» Afin que, sous le ciel, l’héritage de Dieu
» Traverse tous les temps et s’étende en tout lieu !
» Dérobe ce trésor aux tyrans de la terre.
» Honte ! la vérité doit rester un mystère !
» Car du monde usurpé l’infâme souverain,
» Avant qu’il fût semé, foulerait le bon grain. »
Elle dit, et, fuyant de ses membres d’argile,
Son âme s’envola vers son céleste asile.
Les ailes de la mort la ravirent aux cieux ;
Je la revis du cœur en la perdant des yeux.


» Quand dans la paix des morts je l’eus ensevelie,
Sous la pierre ma main prit le livre de vie.
Je lus : il me semblait que des milliers de voix
Qui sortaient du passé me parlaient à la fois,
Que mille vérités m’échauffaient la paupière,
Et qu’un jour tout nouveau me baignait de lumière.
Chaque parole était un éblouissement ;
Moins d’étoiles la nuit sortent du firmament ;
Ce livre racontait comment toutes les choses
D’une parole unique en ordre étaient écloses,
La naissance de l’homme et l’histoire des jours
Qui du jour éternel jusqu’au nôtre ont leur cours.
Il chantait, il pleurait, sa tristesse était tendre ;
À ses sanglots parlés le cœur se sentait fendre.
Plus souvent comme un maître il parlait à l’esprit ;
Et chaque mot profond au fond de l’âme écrit