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Essuyait de la main sur sa joue embrasée,
Ou la sueur brûlante, ou la froide rosée ;
Lui souriait des yeux, de la bouche et du cœur ;
Chargeait son doux regard de pitié, de langueur,
Et, touchant les liens qu’elle eût voulu détendre,
S’essayait par le geste à lui faire comprendre
Qu’elle eût voulu briser les chaînes de ses bras ;
Puis parlait, et voyant qu’il ne répondait pas,
D’un pied impatient elle frappait la terre,
Et devant lui restait immobile à se taire,
Baissait son front voilé du midi jusqu’au soir ;
Et Cédar l’entendait pleurer, mais sans la voir,
Et des larmes du cœur qu’elle eût dû cacher toutes,
Ses pieds sentaient parfois ruisseler quelques gouttes.

Cédar alors, courant rassembler le troupeau,
Retenait par le cou le petit du chameau,
Pendant que Daïdha, sous la mère penchée,
Pressait entre ses doigts la mamelle étanchée.
Quand l’amphore était pleine et que le lait fumant
Débordait sur ses mains de son vase écumant,
Pour empêcher le lait de fuir par l’orifice,
Il cueillait dans les champs la rose et le narcisse,
Et, semant de ces fleurs le breuvage enfermé,
Le couvrait avec soin d’un bouquet parfumé.
À la place où la vierge avait trempé sa lèvre,
Il en buvait un peu comme un chevreau qu’on sèvre,
Puis élevant l’amphore avec ses bras nerveux,
Et sous le poids de l’urne amassant les cheveux,