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collet. Ses habits, trop larges désormais pour sa taille, glissaient de ses épaules et ressemblaient at des habits d’emprunt jetés par la charité publique sur le corps d’un misérable. Tout son aspect semblait calculé par la haine ou combiné par le hasard pour présenter aux regards du peuple quelque chose de rude et de repoussant, plutôt que de triste et d’attendrissant. C’était le spectre de la royauté conduit au supplice, costumé pour laisser en passant son empreinte et son souvenir dans la foule.


V


Le cortège suivit le boulevard, la rue des Capucines et la place Vendôme pour se rendre à la salle de la Convention. Un profond silence régnait dans la foule. Chacun semblait recueillir son émotion et sa respiration dans sa poitrine. On sentait qu’une grande heure de la destinée passait sur la France. Le roi paraissait plus impassible que le peuple. Il regardait et reconnaissait les quartiers, les rues, les monuments; il les nommait à haute voix au maire. En passant devant les portes Saint-Denis et Saint-Martin, il demanda lequel de ces deux arcs de triomphe devait être abattu par ordre de la Convention.

Arrivé dans la cour des Feuillants, Santerre descendit de cheval et, debout à la portière, posa la main sur le bras du prisonnier et le conduisit à la barre de la Convention.