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prince de l’attentat manqué à Haga, et de celui qui le menaçait dans cette fête ; d’une main il poussait l’assassin, de l’autre il retenait la victime, comme s’il eût ainsi préparé lui-même une excuse à ses remords après le forfait consommé.

Le jour fatal il avait passé la soirée dans les appartements du roi, il lui avait vu lire la lettre, il l’avait suivi au bal : énigme du crime, assassin miséricordieux, l’âme ainsi partagée entre la soif et l’horreur du sang de son bienfaiteur.


VIII

Gustave mourut lentement, il voyait la mort s’approcher ou s’éloigner tour à tour avec la même indifférence ou avec la même résignation : il reçut sa cour, il s’entretint avec ses amis, il se réconcilia même avec les adversaires de son gouvernement, qui ne cachaient point leur opposition, mais qui ne poussaient pas leur ressentiment aristocratique jusqu’à l’assassinat. « Je suis consolé, dit-il au comte de Brahé, un des plus grands seigneurs et un des chefs des mécontents, puisque la mort me fait retrouver en vous un ancien ami. »

Il veilla jusqu’à la fin sur le royaume. Il nomma le duc de Sudermanie régent, il institua un conseil de régence ; il nomma Armsfeld, son ami, gouverneur militaire de Stockholm ; il enveloppa le jeune roi, âgé de treize ans, de